REPORTAGE - À l’occasion de la journée de la mémoire des génocides, des élèves de 14 collèges et lycées sont réunis à Paris. Quatre d’entre eux racontent leur vision de leur nouveau rôle d’«ambassadeurs de la mémoire».
«Je voulais poser une question, mais je me suis dit que c’était une mauvaise idée, je n’ai pas osé…» chuchote un jeune lycéen à sa camarade assise à ses côtés dans l’auditorium E.J. Safra du mémorial de la Shoah de Paris. La conférence assurée par Arno Klarsfeld s’achève et les élèves des 14 établissements scolaires venus de toute la France se lèvent dans un joyeux brouhaha. «C’est important de rencontrer des personnes comme Arno Klarsfeld. Ça nous pousse à nous engager», souligne Éva, en terminale ES au lycée des métiers Jean de la Taille de Pithiviers. L’engagement est justement le thème choisi pour cette deuxième rencontre nationale des jeunes ambassadeurs de la mémoire organisée par le réseau des lieux de mémoire de la Shoah en France. Au programme de ces ambassadeurs en herbe: ateliers sur plusieurs figures de l’engagement (Joseph Epstein, Robert Desnos, Jeanine Sontag…), visite de l’ancien camp de Drancy, rencontre avec un rescapé d’Auschwitz, projection du film «Un sac de billes» et ravivage de la flamme du Soldat inconnu le 27 janvier, jour anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz. Cette cérémonie symbolique, qui se déroule en fin d’après-midi en cette journée de la mémoire des génocides et de la prévention des crimes contre l’humanité, attire particulièrement les jeunes. «C’est un honneur d’être là», reprend Eva.
«Éviter que de telles atrocités se reproduisent»
Avant de se réunir à Paris, les élèves ont travaillé des mois durant sur le sujet. Eva et son amie Ilham sont parties en Allemagne à la rencontre d’une déportée. Raphaël, en seconde au lycée ORT de Toulouse, a participé au concours de la Résistance. Kevin, du lycée Delacroix de Drancy, a coopéré avec le mémorial de la Shoah de sa ville. «J’ai beaucoup appris sur l’histoire de Drancy. Et apprendre, c’est comprendre, pour éviter que de telles atrocités se reproduisent. J’ai l’impression que les jeunes autour de moi sont conscients de ce qui s’est passé, mais ne sont pas toujours assez informés...» Du travail supplémentaire pour ces jeunes, nombreux à passer le bac au mois de juin? Oui, mais, comme le souligne Raphaël, «la Shoah fait partie de notre histoire de France». «Et ça nous permet de développer notre regard critique!», rajoute Ilham. «Parler de la Shoah, en cours et en dehors, ça nous sensibilise. Personne ne reste indifférent quand je raconte ce que j’apprends, et je compte bien continuer à témoigner, pour que plus tard mes futurs enfants deviennent à leur tour des ambassadeurs de cette mémoire.» Que les survivants de l’Holocauste ne s’inquiètent pas: les jeunes prennent le relais.